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Parcours pédagogique

Les écritures dans l'Égypte antique

Sur les traces de Champollion
Par Céline Poulmane, professeure d'histoire-géographie
5 min de lecture
Fragment du Livre des morts au nom de Soutymès
Le programme d'histoire de 6e invite à se pencher sur la naissance des premières écritures en Mésopotamie ou en Égypte. Ce thème peut donner l'occasion d'introduire une réflexion méthodologique avec les élèves, en se penchant notamment sur la figure de Champollion. En effet, comment accéder à la pensée, la culture, l'histoire d'une civilisation disparue sans comprendre sa langue ? En marchant dans les pas du savant, l'élève prend également conscience du processus de construction de l'histoire et de l'importance de la source.
Ce parcours pédagogique introduit l'existence de différentes écritures dédiées à des usages différents ; le rôle du scribe dans les sociétés antiques et la pratique du déchiffrement.
Les ressources pour réaliser l'activité

Les trois styles d'écritures égyptiens

Trois systèmes d'écritures coexistent dans l'Égypte antique : 

  • Le plus ancien est celui des hiéroglyphes, apparu presque en même temps que l’écriture cunéiforme à la fin du 4e millénaire. Utilisé jusque dans les premiers siècles de l'ère chrétienne (la dernière inscription datée connue se trouve sur un temps de Philae et remonte à 394 ap. J.-C.), il possède un caractère monumental et sacré, et est souvent utilisé dans la pierre ou des matériaux précieux. Les signes hiéroglypheiques peuvent revêtir plusieurs fonctions : représentation d'une idée (idéogrammes), d'un son (phonogramme) ou d'un élément grammatical (déterminatif).
  • Le hiératique dérive directement du système hiéroglyphique et se développe dès les débuts. Plus simple et plus cursif, il permet une reproduction rapide du texte. C’est l’écriture de l’administration et des transactions commerciales, mais elle sert aussi à noter les textes littéraires, scientifiques et religieux. Réalisé d'abord au pinceau puis beaucoup plus tard à la plume et à l’encre, les signes hiératiques couvrent poteries, tablettes de bois, bandes de cuir ou tissus et surtout papyrus.
    On commence à observer une nette différence, parmi les documents datés d’environ 1000 avant J.-C., entre les textes administratifs et les textes littéraires ou religieux ; dans ces derniers, le hiératique se fige en une écriture appliquée de copistes. C’est d’ailleurs pourquoi les Grecs la qualifient de « hiératique » (de hieros, sacré, sacerdotal) à partir du 7e siècle avant J.-C., en effet, elle n’est plus employée que pour la transcription des textes sacrés.
  • C'est le démotique (écriture « populaire ») qui, à partir du 7e siècle av. J.-C., remplace le hiératique dans les documents de la vie quotidienne (administratifs, juridiques, économiques), puis dans la littérature et les ouvrages scientifiques. Plus cursive et simplifiée, possédant des ligatures, elle se lit elle aussi de droite à gauche. La fameuse Pierre de Rosette, datant du 2e siècle avant J.-C., porte ainsi le même texte en hiéroglyphes, en démotique et en grec.

Activité possible

  • L'élève est invité, par la comparaison de plusieurs documents, à mettre en évidence l'existence des deux principales formes de l'égyptien ancien : le hiéroglyphique et hiératique, qui correspondent à des supports et à des usages différents.
  • On peut également utiliser la vidéo proposée et faire mettre en évidence trois éléments fondamentaux : les raisons de la naissance de l'écriture, la différence entre hiéroglyphes et hiératique et la différence entre idéogrammes et phonogrammes. On se posera ensuite la question : pourquoi les hiéroglyphyes étaient-ils difficiles à déchiffrer ?
Les ressources pour réaliser l'activité

Le rôle du scribe dans la société égyptienne

En Égypte comme dans les autres civilisations antiques, mésopotamienne, indienne ou chinoise par exemple, le scribe appartenait à l'élite de la société. On distinguait deux types de scribes : l'écrivain public et l'employé d'État, d'une part, qui rédigeaient les actes de la vie quotidienne ; les lettrés et savants, d'autre part, des maîtres de la création littéraire et scientifique, de l'édition, de la mémoire historique et du devenir des rois et des peuples.

Le scribe égyptien s'appelait sesh, c'est-à-dire « celui qui utilise le pinceau » ; le terme mésopotamien est dub-sar, ou « celui qui écrit la tablette », ce qui résume les outils de base des écritures égyptiennes sur papyrus et de l'écriture cunéiforme sur argile. Thot, dieu à tête d'ibis ou représenté sous forme de babouin est considéré comme le patron des scribes en Égypte. Il enregistre les décisions des dieux, leur donne réalité, et règle le cours du temps.

Activité possible

  • Repérer dans les documents les différents outils du scribe : pinceau, papyrus, encres rouge et noire, tablette de bois ou écritoire.
  • Comparer différentes représentations pour comprendre son rôle social et symbolique : inclusion dans des scènes, présence du dieu Thot à ses côtés...
  • Rédiger un texte expliquant la place du scribe dans la société.
Les ressources pour réaliser l'activité

Jean-François Champollion et les hiéroglyphes

Le parcours de Champollion est avant tout celui d'un savant, nourri des Lumières et de la Révolution, passionné de langues anciennes, et qui à force de patience et de recoupements est parvenu à percer l'un des grands mystères de son temps : le déchiffrement de l'écriture égyptienne.

Fils d'un libraire grenoblois, les deux frères Champollion, Jacques-Joseph (1778-1867) et Jean-François (1790-1832) s'engagent très tôt dans l'étude des langues anciennes. Mentor de son cadet, Jacques-Joseph évolue dans les cercles en vue de Grenoble et y introduit son frère, qu'il initie aussi aux langues anciennes. Très jeune, Jean-François Champollion se passionne pour l'hébreu, l'arabe, le syriaque, le chaldéen... S'ennuyant dans son lycée, il se lance dans un dictionnaire géographique de l'Orient et fréquente la bibliothèque publique de la ville, dont son frère est le conservateur. Là se trouvent quelques objets égyptiens, à qui Champollion doit peut-être son intérêt pour la question de l'écriture égyptienne.

Le mystère des hiéroglyphes passionne d'autant plus à cette époque que l'Égypte est à la mode, comme l'« Orient » de manière générale. Au milieu du 18e siècle, l'abbé Barthélémy, déchiffreur de l'alphabet phénicien, avait déjà fait une avancée majeure, en identifiant la forme du cartouche comme un élément servant à entourer les noms des pharaons. Découverte lors de l'expédition de Bonaparte en Égypte (1798-1801), la pierre de Rosette a aiguisé les esprits ; deux savants en particulier, le suédois Johan David Åkerblad (1763-1819) et l’anglais Thomas Young (1773-1839), parviennent à corréler certains mots et signes avec la traduction grecque.

Jean-François Champollion bénéficie quant à lui de plusieurs atouts essentiels : en premier lieu, son excellente maîtrise du copte, langue dérivée de l'égyptien ancien ; mais aussi, son patient travail de collecte et de recoupement de documents égyptiens, facilité par les réseaux savants dans lesquels s'inscrit son frère. Revenu à Grenoble après quelques temps passé à Paris, il publie enfin, en septembre 1822, la Lettre à Monsieur Dacier, dans laquelle il expose le cheminement qui lui a permis de comprendre l'écriture hiéroglyphique, et notamment le fait qu'un même signe pouvait avoir des valeurs différentes.

Les dix années qui suivent le consacrent comme l'un des pères de l'égyptologie : peaufinant ses premières intuitions, il se consacre à la rédaction d'une Grammaire égyptienne qui décrit, de manière pédagogique et complète, le fonctionnement de la langue et de l'écriture égyptiennes ; mais il s'intéresse également à la religion dans son Panthéon égyptien et prend en 1826 la charge de conservateur du musée égyptien de Charles X. Ce n'est que tardivement, entre août 1828 et décembre 1829, qu'il met le pied sur sa terre promise, en tant que directeur d'une expédition franco-toscane en Égypte. « J’ai le droit de vous annoncer qu’il n’y a rien à modifier dans notre Lettre sur l’alphabet des hiéroglyphes », écrit-il à son protecteur, M. Dacier. Un voyage qui l'épuise cependant : malade, il décède moins de deux ans après son retour. C'est son frère, Jacques-Joseph, qui est l'éditeur et le promoteur de la plupart de ses travaux.

Activités possibles

  • La fiche élève propose un travail de recherche, à réaliser en classe ou à la maison, autour de la figure de Champollion et de sa méthode.
  • Il est possible également d'utiliser la vidéo proposée pour mettre en évidence le personnage de Champollion, le rôle de la Pierre de Rosette et les spécificités de l'écriture hiéroglyphiques, combinaison d'idéogrammes et de phonogrammes.

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